Ca y’est, une version interactive de Vizir est en ligne et accessible! Et c’est datapublica qui l’a fait. Après une première version expérimentale développée par linkfluence (il y a déjà quelques temps), cette nouvelle version démontre qu’un cap important a été franchi par l’équipe du pôle de compétitivité Images et Réseaux animée aujourd’hui par Gérard Lebihan après Bertrand Guilbaud. Evidemment, j’aurais aimé que l’Atelier Iceberg ait été choisi pour répondre à la demande du pôle de compétitivité breton (mais à vocation mondiale). Finalement, c’est datapublica qui a été sélectionné pour développer cette version (presque) finale d’un projet que j’avais imaginé il y a (je crois) cinq années. Mais je ne cacherai pas mon enthousiasme de voir datapublica à l’oeuvre, un des grands spécialiste français des masses de données et de l’open-data mais aussi un des acteurs majeurs à mon sens de cette communauté de « fabricants de boussoles » qui inventent aujourd’hui de nouveaux moyens de navigation dans les données.

Dans ma démarche de cartographe, Vizir a toujours constitué un projet exemplaire pour imaginer les solutions techniques et méthodologiques qui permettraient de développer cet outil générique de lecture et de navigation dans des sets de données qualifiées. Pour ceux qui accumulent tous les jours des informations dans des fichiers Excel, des tableaux ou des bases de données, Vizir peut représenter une solution pertinente pour observer, suivre, synthétiser voire anticiper le développement de ses projets ou de ses partenariats. La chaîne de traitement, depuis les stocks de données jusqu’à l’interface, a depuis longtemps été conçue comme la plus simple possible: une séance d’une demi-journée suffirait à préciser avec un client le formalisme à utiliser pour « rentrer les données » à partir d’un fichier statique type Excel. Mais datapublica à franchi le véritable « saut » technologique et qualitatif en « pluggant » Vizir de façon dynamique à l’ERP du pôle Images et Réseaux via une API. On imagine aisément, ce que pourrait permettre de collecter et de rassembler comme informations une série de Vizir pour les autres pôles de compétitivité, ou bien alors le dashboard global à concevoir pour une tutelle comme la DGCIS (renommée aujourd’hui DGE – Direction Générale des Entreprises).

Statiques ou dynamiques, les données potentiellement intégrales dans ce nouveau Vizir sont nombreuses: des projets (quelle que soit leur nature ou leur échelle) mais aussi des publications scientifiques, des brevets, des documents techniques…En intégrant ces deux leviers essentiels à l’activité de monitoring ou d’évaluation que sont les cartes géoréréfencées et la time-line, on comprend que Vizir peut être adapté à la gestion (au « management » dirait-on aujourd’hui) des projets et des réseaux de coopération en territoires, à l’échelle régionale notamment. Les organismes consulaires tout comme les industriels et, surtout, les responsables du développement économique et social qui officient pour les métropoles pourraient y trouver un instrument pertinent (Vizir intègre différentes fonctionnalités d’export pour préparer, notamment, des exposés publics).

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Vizir prend enfin une vraie dimension réseau avec une architecture client-serveur déployée par datapublica. L’outil est conçu de façon modulaire, autour d’une série de fenêtres indépendantes mais qui se répondent l’une l’autre, facilitant les requêtes croisées ou multiples à l’écran. Chacun comprendra que ce principe des modules (en javascript, notamment sigmaJS pour la visualisation de graphes) ouvre de nombreuses possibilités pour adapter Vizir à de nombreux contextes et pour d’autres champs que les pôles de compétitivité, ou le management de projets. A titre personnel, j’envisage déjà deux types d’application: un instrument de suivi des publications scientifiques à partir des notices Scopus ou du WoS (pour une direction à la recherche d’un établissement) et pour un acteur de l’industrie comme outil d’aide au management de son portefeuille de brevets.

Avec Vizir, le pôle Images et Réseaux dispose d’un premier outil de cartographie des territoires innovants qu’il a lui-même accompagnés autour, par exemple, des images numériques de demain ou de la photonique. En particulier, cette première version de Vizir permet de naviguer selon les grands trois axes de la gestion de projets en territoires:

La navigation par projets, autour d’une série de modules comme la carte géographique dynamique pour situer les acteurs associés à un projet ou l’affichage, à l’opposé de l’écran, des mots-clés représentatifs du thème principal du projet labellisé.

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Navigation par partenaires. Le graphe central affiche les relations entre les partenaires et les projets. Je reconnais la difficulté à naviguer dans un graphe trop volumineux comme ici (synonyme, cependant, de la longévité et dynamique des activités du pôle!). Cependant, le couplage avec le nuage de mots-clés en bas nous permet, en deux clics, de trouver rapidement des partenaires et un répertoire de compétences précises avec un graphe (et des informations latérales) remises à jour en temps réel.

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Cliquons sur un mot-clé (ou plusieurs successivement, comme une série de filtres sémantiques), sélectionnons un partenaire d’un projet on l’on accède à sa fiche qui comporte tous les informations nécessaires si l’on est à la recherche de compétences particulières parmi les membres du pôle.

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La navigation par thèmes. C’est le panneau que je préfère car il permet de faire varier dynamiquement dans le temps le jeu des mots-clés qui servent à décrire le contenu des projets. On peut esquisser l’évolution thématique des projets labellisés par le pôle. C’est tout le principe de ce que j’appelle les « empreintes sémantiques », autrement dit la configuration particulière d’une batterie de descripteurs de « contenu » laissés dans une base de connaissances par un acteur (par exemple l’empreinte d’un chercheur dans une base de publications scientifiques et qui pointent vers ses champs compétences) ou une organisation (le même principe mais appliqué à l’échelle d’un laboratoire).

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A travers ces trois panneaux, cette première version de Vizir permet pour la première fois d’apercevoir les multiples façons dont sont mobilisés en amont les moyens techniques, humains et financiers des acteurs publics (Etat, collectivités territoriales, OSEO-BPI…), privés ou industriels (structures de RetD) ou bien encore issus des organisations de la société civile (associations) dans le développement de cet écosystème thématique que l’on appelle un « pôle de compétitivité ». Mais chacun peut aussi se rendre compte des retombées des projets labellisés, individuellement comme globalement (un aspect central que je n’avais pas eu le temps de développer mais qui me semble être au coeur d’une démarche de suivi, voire d’évaluation): projets de start-ups, publications scientifiques, événements ou animations territoriales…Techniquement, Vizir est potentiellement reconfigurable autour de nombreux scénarios d’utilisation, depuis la variété des données en entrée jusqu’aux variations des champs d’études (d’un objet particulier à la cartographie d’ensembles plus vastes, comme ici un pôle de compétitivité en région), sans oublier les multiples facettes de l’information que propose les modules composant l’interface (variation temporelles dans les données, géoréférencement sur des cartes dynamiques, nuages de mots-clés, courbes d’évolution des phénomènes, répertoires de membres ou d’acteurs, description des projets…).

Au delà, il faudrait imaginer aussi ce que pourrait apporter à tous les acteurs de l’innovation de notre pays le déploiement d’une série de « radar de projets » de ce type dans les pôles de compétitivité, et au delà pour les projets européens, ANR, régionaux. J’imagine ce que cela donnerait pour le suivi du travail en région de BPI-France ou encore pour le suivi des partenariats dans l’univers des acteurs industriels. Autant de domaines que datapublica, l’Atelier Iceberg et d’autres occuperont demain. Mais, plus que tout, Vizir rappelle tout ce que ce type de réussite technique doit au travail manuel de qualification et de vérification des informations mené quotidiennement par les acteurs, notamment les documentalistes, les ingénieurs, les bibliothécaires, les chargés d’étude ou les secrétaires auquel le dispositif rend d’abord hommage.